Intro sur l’hygiène

L’hygiène – ensemble des mesures préventives de préservation de la santé – est devenue une composante essentielle de notre vie. Aujourd’hui, se laver les mains, faire vacciner ses enfants, ou boire de l’eau saine nous semble évident. Mais cela n’a pas toujours été de soi : la notion d’hygiène étroitement liée aux croyances populaires, aux coutumes, mais aussi à l’état des connaissances scientifiques et médicales a évolué. Ainsi, l’hygiène peut se raconter en 2 grandes périodes fondamentales séparées par la révolution biologique qu’a été la découverte des micro-organismes et celle de leur rôle dans les maladies. Cette ligne de partage propulse l’hygiène au rang d’une discipline scientifique s’appuyant sur des observations irréfutables. Elle balaie de nombreuses idées fausses et permet d’instaurer des pratiques qui sont pour beaucoup dans l’allongement de notre espérance de vie.

L’hygiène au fil du temps

La préhistoire : rien ne vaut l’expérience

Il est difficile de faire le point sur la notion d’hygiène en ces temps reculés mais on peut penser que seule l’expérience comptait. Les survivants faisaient les déductions utiles à leur sauvegarde : le précepte « ne pas manger tout ce qui tombe sous la main » devait être appliqué à la lettre, donnant naissance aux prémisses de l’hygiène alimentaire. Quant aux autres types d’hygiène, ils apparaîtront bien plus tard.

L’antiquité : Bains, crèmes et volupté

A Athènes, les grecs inventent des toilettes publiques et emportent les déchets hors de la ville.

A Rome, les Romains installent également des toilettes publiques ainsi que des fosses en dehors de la ville où les habitants déposent leurs ordures et les restes d’animaux sacrifiés.

Le mot hygiène dérive du nom de la déesse grecque Hygié qui était la déesse de la santé et de la propreté. Fille d’Asclépios, la médecine, Hygié symbolise la prévention alors que sa sœur Panacée est la déesse guérisseuse reliée au traitement médical et aux médicaments. Dans la Grèce Antique et la Rome Antique, l’hygiène est symbole de santé et se concrétise par exemple par la fréquentation des bains publiques. La gymnastique médicinale a été inventée par le médecin Hérodicus de Lentini qui avait constaté les effets bénéfiques de l’exercice physique sur la santé. Elle était aussi recommandée par Hippocrate.

Bains à température variable, massages, crèmes parfumées et rince-doigts : l’hygiène des grecs et des romains avait un sens purificateur mais évoquait aussi la volupté. Attentifs aux soins corporels, les romains passaient beaucoup de temps à se baigner dans les thermes collectifs. Ces coutumes s’étendaient jusqu’en Orient avec les bains turcs ou les hammams qui aujourd’hui encore mêlent rite de purification religieux, plaisir et hygiène.

Moyen âge : propre sur soi et « tout-à-la rue »

A cette époque, le pot de chambre, qui est apparu sous les romains, est encore de rigueur et on fait ses besoins parfois devant tout le monde ! On se baigne beaucoup en ville où l’hygiène corporelle est très présente. Les bains publics ou étuves permettent aux hommes de se retrouver et de se détendre dans un réel lieu de plaisir. On en dénombrait 25 pour 250 000 habitants, à Paris en 1292.

De même, partout en Europe, on voit fleurir la mode du bain, et les latrines, vestiges de la présence romaine. Mais petit à petit, les bains publics deviennent des lieux mal fréquentés… En ville, on se parfume, on se coiffe, et il existe des blanchisseurs.

Dans la rue, l’hygiène est moins flagrante : c’est l’époque du « tout-à-la rue » ! Excréments et eaux usées s’y mêlent et nagent dans les rigoles se trouvant au centre des rues… Les habitants jettent leurs déchets, excréments, carcasses d’animaux dans la rue ou les rivières. Les gens boivent l’eau de la Seine !!! Et Paris, à cette époque, ne sent pas bon ! Les rues sont boueuses, sales et malodorantes.

Ne pouvant plus supporter l’odeur, en 1185 Philippe Auguste ordonne de paver les rues principales et crée des canaux et fossés centraux pour nettoyer certains quartiers.

Au XIIIème siècle, il existe des Règlements pour remédier au manque d’hygiène : paver les rues, nettoyer une fois par semaine devant sa maison et ne pas laisser traîner les ordures et les déchets.

De nombreuses maisons ont des lieux d’aisance placés au grenier ( toilettes) qui s’écoulent dans le ruisseau au milieu de la rue. Des conseils d’hygiène sont donnés et les gens du Moyen Âge se baignent dans des étuves (bains publics ).

Dans tous les quartiers on crée des puits où chacun doit déverser ses immondices appelés « trou punais » et en 1343, Charles V construit des fossés d’évacuation couverts pour éviter les odeurs.

Mais malgré cela les gens ne respectent pas les Règlements ! Ils refusent de porter les déchets aux endroits prévus et continuent à polluer la Seine ce qui entraîne des épidémies de peste. La plus importante fut la Peste Noire de 1347 qui fit des millions de morts en Europe. A cette époque, les gens pensent que c’est l’odeur des déchets qui rend les gens malades. Ils ne se rendent même pas compte que ces ordures grouillent de bactéries…

Seuls les petits cochons qui vivent librement dans la rue nettoient la ville en mangeant les ordures !

Renaissance : le corps « protégé » sous la crasse

L’hygiène marque une pause en particulier à cause d’une perception différente du corps – il est tabou – et de l’apparition de maladies très graves telles que la syphilis qui se propagent sans qu’aucun scientifique ne puisse réellement expliquer pourquoi. On croit alors que l’eau pénètre dans le corps par les pores de la peau et transmet la maladie. La peste fait aussi beaucoup de ravage en occident. Aussi pensait-on qu’une couche de crasse assurerait une protection contre les maladies.

La toilette corporelle devient donc sèche. On utilise uniquement un linge propre pour frotter les parties visibles du corps ! L’hygiène vestimentaire se développe : plus on est riche, plus on change de vêtements. Un habit blanc qui était devenu noir était bien perçu : il avait capté la saleté… Donc, plus besoin de se laver…! Cette évolution semble s’appliquer à l’occident en général. Paradoxalement, l’eau est utilisée à des fins thérapeutiques: associée à des plantes pour le bain ou en décoction…

Le XVIIIème siècle voit réapparaître les latrines collectives dans les maisons, et l’interdiction de jeter ses excréments par la fenêtre, chose qui était devenue pratique courante ! De même, on incite les habitants des villes à jeter leurs ordures dans les tombereaux affectés à cet effet.

Parallèlement la chimie avance : en 1774, le chimiste suédois Carl Wilhem Scheele découvre le chlore. Les scientifiques découvriront plus tard que mélangé à l’eau, il blanchit les objets (Claude Berthollet) et mélangé à une solution de soude, il désinfecte (Antoine Labarraque). L’eau de Javel vient de faire son apparition !

XIXème siècle : urbanisme et sciences sont à l’œuvre

C’est le siècle du renouveau de l’hygiène : les travaux d’urbanisme se développent. Ils intègrent la création de fosses sceptiques et prévoient un mécanisme d’évacuation des eaux usées jusqu’à l’égout pour toute nouvelle construction. Les réseaux d’eau potable et de tout-à-l’égout font alors, peu à peu, leur apparition. Les égoutiers enlèvent les boues. On aménage les voies pour qu’elles soient nettoyées facilement et le ruisseau central est rejeté sur les côtés de la chaussée (caniveaux).

En 1884, Eugène Poubelle ordonne le dépôt des déchets dans des récipients spéciaux munis d’un couvercle pour déposer leurs ordures ménagères devant leurs portes, afin qu’elles ne soient plus éparpillées dans la rue avant d’être ramassées par les services municipaux.
D’où le nom de nos « poubelles » !

Les eaux usées, riches en azote, sont utilisées pour faire fructifier la terre tout en se purifiant (principe de nitrification).. C’est l’apparition des premiers champs d’épandage. Alors que les « water-closet » anglais fleurissent dans toute l’Europe, les premières expositions sur l’hygiène ouvrent leurs portes.

Du côté des sciences, les progrès sont considérables et relèguent au placard les vieilles croyances, en premier lieu celle de la « génération spontanée » grâce aux expériences de Louis Pasteur.
A mesure que l’on découvre de nombreuses bactéries et leur rôle clé dans les infections connues, on comprend qu’il est possible de s’en protéger.

En filigrane se dessinent les premières mesures d’hygiène : le lavage des mains et la toilette quotidienne à l’eau et au savon. Elles seront relayées à l’échelle internationale par les médecins et les politiciens de l’époque, qui se retrouvent lors de congrès. Un but essentiel : vaincre les maladies contagieuses, peste, choléra, typhoïde, typhus, fièvre jaune. C’est l’époque des quarantaines.

Ce sont aussi les médecins, personnages influents, qui observent les comportements, les infrastructures (marché, abattoir, caniveaux…) et qui proposeront d’en améliorer l’hygiène. En 1847, Ignac Semmelweis constate que des mesures d’hygiène limitent la mortalité par fièvre puerpérale (post-accouchement) et l’écossais Joseph Lister inspiré par les travaux de Pasteur, utilise l’antisepsie en chirurgie. L’hygiène synonyme de prévention est lancée. Toilette et vaccination en seront les maîtres mots.

XXème siècle : hygiène rime (presque) avec comportement

Les conférences internationales de la fin du 19ème aboutissent à la mise en place d’un office international d’hygiène publique, qui s’installe à Paris en 1907, et qui deviendra l’OMS (Organisation mondiale de la santé) en 1946. Une lutte et une coopération s’engagent contre les maladies infectieuses.

Doucement, la notion d’hygiène s’ancre dans les esprits grâce notamment à son introduction dans les écoles. Cela permet que cette notion s’étende à toutes les couches de la société.

Le changement est lent car il faut lutter encore et toujours contre les croyances et les habitudes, l’idée du propre et du sale… Les progrès en biologie vont permettre de démonter les mécanismes de contaminations, d’infection…

Selon les pays, les habitudes varient mais l’hygiène s’imposera partout. Il semble encore aujourd’hui que des progrès restent à faire : le lavage des mains au sortir des toilettes ne semble pas toujours aller de soi !! En outre, si les mesures d’hygiène ont permis de circonscrire de terribles maladies comme la syphilis, la peste, le choléra ou la tuberculose, l’époque moderne voit resurgir d’anciens fléaux (la tuberculose) ou en apparaître de nouveaux (le SIDA).

La recherche

Les progrès de la science : 500 ans de découvertes

1590 Mise au point des premiers microscopes composés, en Italie et en Hollande.

1674 Le Hollandais Antony Van Leeuwenhoek décrit pour la première fois des bactéries sans savoir qu’elles en sont : il les appelle les animalcules, « petits insectes invisibles à l’œil nu ». Il semble avoir pressenti leur pouvoir infectieux.

1774 Carl Wilhem Scheele découvre le chlore, lequel, quelques années plus tard sera mélangé à l’eau ou à une solution de soude (c’est l’hypochlorite de soude de Claude Berthollet – « l’eau de javel ») et utilisé pour la désinfection (Antoine Labarraque).

1796 L’Anglais Edward Jenner découvre le principe de la vaccination en inoculant la vaccine (germe responsable d’une maladie proche de la variole mais bénigne) de la vache à des patients, d’où le nom de vaccination.

1847 Le Hongrois Ignac Semmelweis constate qu’une bonne hygiène corporelle du médecin, en particulier le lavage des mains entre chaque examen, évite au patient d’être contaminé.

1865 Le Français Claude Bernard définit les principes fondamentaux de la recherche scientifique.

1867 L’Anglais Joseph Lister invente le concept d’antisepsie, qu’il applique à la chirurgie et à la désinfection des plaies grâce à des produits iodés.

1873 L’Allemand Robert Koch découvre le bacille responsable de la tuberculose et qui portera son nom (bacille de Koch).

1879 Le Français Louis Pasteur découvre le principe du vaccin au moyen de cultures atténuées.

1928 L’Anglais Alexander Fleming découvre la pénicilline : puissant bactéricide qui sera utilisé bien plus tard comme antibiotique.

1938 René Dubos extrait d’un micro-organisme du sol le premier antibiotique connu.

Louis Pasteur

Né à Dole (Jura) en 1822, Louis Pasteur a tout d’abord démontré un don certain pour le dessin. Mais ses talents artistiques passeront rapidement au second plan, derrière son désir d’entrer à l’Ecole Normale Supérieure. Il se consacre alors à la science et est rapidement remarqué pour sa découverte sur la stéréochimie des cristaux, en 1848. Nommé professeur et doyen de la faculté des sciences de Lille en 1854, il se lance alors dans des études sur la fermentation et découvre la fermentation lactique et la vie anaérobie. En 1864 Pasteur démontre que la théorie de la génération spontanée n’est pas valable, et invente le procédé de la pasteurisation l’année suivante.

Après des recherches sur la maladie du ver à soie ainsi que la bière et la fermentation, Pasteur débute des recherches sur les maladies virulentes en 1877. Deux ans plus tard, il découvre le principe du vaccin au moyen de cultures atténuées et s’attaque au problème de la maladie du charbon chez le mouton et de la rage chez l’être humain. Si le vaccin contre le charbon est mis au point dès 1881, il faudra attendre 1885 pour que le jeune Joseph Meister soit le premier humain a être vacciné avec succès contre la rage.

Cette découverte vaut une reconnaissance mondiale au scientifique, et plus encore, la participation internationale à la création de l’Institut Pasteur. Laboratoire de recherche, hôpital, lieu de formation, outil de communication des résultats… L’Institut est le condensé de toutes les idées que Pasteur a glanées au cours de sa vie. Inauguré en 1888, l’Institut Pasteur ne tarde pas à se ramifier en un réseau réparti sur les cinq continents. Tous les Instituts perpétuent la dimension de l’action pasteurienne : services, santé publique, recherche, enseignement, en parfaite autonomie et adéquation avec l’environnement.

Louis Pasteur s’éteint à Marnes-la-Coquette le 28 septembre 1895.

Les institutions de recherche :

Les institutions ou les organismes dédiés à la recherche dans le domaine de la santé ou de la prévention sont nombreux, partout dans le monde et particulièrement en Europe. La lutte contre les maladies passe par la recherche de leurs mécanismes d’apparition, mais aussi la compréhension des questions de santé, du fonctionnement social des pays et de l’hygiène. La plupart de ces organismes comprennent un grand nombre de laboratoires qui recouvrent de nombreuses disciplines : en France, on peut citer l’Institut Pasteur, le CNRS, l’INSERM… qui en sont les premiers représentants. L’essor de la biologie moléculaire et principalement de la génétique permet d’espérer de grandes découvertes dans un avenir proche, et le travail de milliers de chercheurs et de personnes travaillant à leurs côtés laisse augurer des découvertes toujours plus nombreuses et capitales, pour lutter contre les fléaux modernes.

Les grandes victoires de la science et de l’hygiène

La rage :

La rage fait partie des maladies qui ont le plus marqué les esprits et répandu la terreur dans le monde entier. Louis Pasteur, qui a découvert le principe du vaccin, met toutes ses connaissances au service de l’éradication de cette maladie et s’appuie sur d’autres travaux, en particulier ceux de l’Anglais Jenner : il crée le premier vaccin administré à l’homme, après avoir découvert le principe d’atténuation (diminution du pouvoir infectieux d’un agent pathogène). Il met ainsi au point un vaccin antirabique à partir de moelle de lapin contaminée, ayant perdu son pouvoir infectieux. Ces premiers vaccins sont d’abord testés sur des chiens. Le 6 juillet 1885, il injecte son vaccin à un jeune garçon mordu par un chien enragé, Joseph Meister. Ce vaccin stoppe l’infection : une révolution thérapeutique vient de naître.

La diphtérie :

Maladie caractérisée par la formation de fausses membranes à l’entrée des voies respiratoires, la diphtérie était la plus grande cause de mortalité infantile à la fin du XIXème siècle avec des dizaines de milliers de cas chaque année. En 1888 Emile Roux et Alexandre Yersin découvrent que la maladie n’est pas due au bacille identifié, mais à la toxine qu’il produit. Il faut donc apprendre à maîtriser le poison. Grâce aux travaux d’Emile Behring, un médecin allemand, qui identifie l’antitoxine, Emile Roux et ses collaborateurs mettent au point une méthode de traitement curatif en 1844 : la sérothérapie.
Le vaccin est l’œuvre de Gaston Ramon, en 1926, qui le développera grâce à des toxines rendues inactives.

La tuberculose :

Maladie infectieuse et contagieuse affectant les poumons, la tuberculose entraînait en France une mortalité annuelle de l’ordre du septième de la population, au début de ce siècle. Le microbe responsable de la tuberculose est le bacille de Koch, découvert en 1881 par le microbiologiste allemand du même nom. Mais la découverte d’un sérum ou d’un vaccin tarde, du fait de la localisation pulmonaire du bacille, qui rend la maladie chronique. C’est un membre de l’Institut Pasteur, Albert Calmette qui va finir par mettre au point un vaccin, le BCG (Bacille Calmette et Guérin), qui sera testé sur l’homme en 1921.

La peste :

Le « Châtiment de Dieu », un des fléaux les plus terribles de l’histoire de l’humanité, qui aurait décimé plus du tiers de la population française en l’an 1348, et des millions d’êtres humains de par le monde. Maladie hautement contagieuse transmise par la puce, elle est due à un bacille qu’a identifié Alexandre Yersin en 1894. En son honneur le bacille prendra le nom de Yersinia pestis. Une fois le bacille identifié, A. Calmette produira un sérum anti pesteux, puis Girard et Robic mettront au point un vaccin atténué efficace en 1930. De nos jours, les traitements antibiotiques permettent le plus souvent de guérir la maladie, cependant la résurgence de souches résistantes n’est pas à négliger : plus de 18 000 cas humains ont été déclarés à l’OMS ces 15 dernières années par 24 pays.

L’hygiène publique

Eau propre et eaux usées

Très tôt, les édiles des premières citées comprennent l’importance de l’approvisionnement en eau qu’ils cherchent à conquérir malgré la construction systématique des villes près des fleuves et points d’eau. L’essor urbain des cités grecques ou romaines nécessite des structures propres pour faire face aux besoins toujours plus importants en eau. D’imposants aqueducs sont alors construits, mais leur entretien (curetage et réparation des fuites) devient trop lourd pour les provinces — notamment gauloises — qui les abandonnent le plus souvent.

Au Moyen Âge, les édiles se préoccupent de l’assainissement urbain, mais les décisions publiques sont peu suivies d’effets car les charges en incombent encore aux riverains. Le plus souvent, les ordures s’entassent dans les rues non pavées, et les eaux usées sont le plus souvent jetées par la fenêtre. À Paris, on vidange ses ordures dans la Seine, là même où l’on puise l’eau potable.

Les premières mesures prophylactiques datent des xive-xve siècles, lorsque l’on décide, entre autres, de ne plus jeter le sang des saignées dans la Seine. Au xvie siècle, deux égouts traversent la capitale à ciel ouvert, mais ils débordent à la moindre pluie, inondant les rues boueuses et malodorantes. L’alimentation en eau provient de quelques rares fontaines, de puits creusés dans les cours des maisons ou aux coins des rues ; mais cette eau est souvent souillée par les infiltrations et on ne la consomme que lorsque celle du fleuve est imbuvable.

C’est seulement avec l’affirmation de l’autorité de l’État que les politiques de salubrité publique prennent plus d’ampleur. Pourtant, l’adduction d’eau, très coûteuse, progresse lentement et le nettoyage des rues par arrosage n’est vraiment régulier qu’à partir du milieu du xviie siècle. Leur pavage n’empêche pas l’invasion de détritus, de rigoles méphitiques où s’amassent tous les résidus urbains.

Nouvelles politiques de salubrité publique

C’est au xviiie siècle que l’hygiène publique progresse réellement avec à la fois la fondation du Conseil d’hygiène et de salubrité de Paris chargé de contrôler la voirie, les marchés et les logements et avec la création de la Société royale de médecine en 1778. Puis, à partir du xixe siècle, médecins et pouvoirs publics, convaincus de l’influence de l’hygiène sur la santé, encouragent pour la première fois le développement généralisé des pratiques de propreté.

En décembre 1848 sont fondés les Conseils départementaux d’hygiène, s’intéressant tant à l’installation et l’entretien des égouts qu’à l’alimentation en eau potable. Partout, les hygiénistes veillent à faire prendre des mesures pour le filtrage de l’eau et la séparation des eaux usées et des eaux propres. Les nouvelles épidémies de choléra (1830-1840) déclenchent les premières mesures sanitaires concernant l’habitat dont on critique l’exiguïté, le manque d’aération et de propreté.

Les premiers grands chantiers pour l’adduction d’eau datent du début du xixe siècle : le canal de l’Ourcq destiné à alimenter Paris en eau potable est achevé en 1822. Si les premiers trottoirs apparaissent en 1782 à Paris, il faut surtout attendre les travaux d’Haussmann pour voir disparaître les ruelles boueuses et les immeubles vétustes. Les rues de Paris sont enfin bordées de caniveaux remplaçant la mare stagnante qui se formait au milieu des ruelles. Grâce à l’ingénieur Eugène Belgrand, le réseau d’égout parisien se modernise et s’étend, mais sa mise en place et le branchement des immeubles au réseau restent lent. L’eau courante qui arrive enfin aux premiers robinets monte encore rarement les étages, et il faut le plus souvent se rendre au rez-de-chaussée pour la puiser. Si l’on compte encore 30 000 puits à Paris en 1871, les deux tiers sont contaminés ou inutilisables.

Hors de Paris, la situation est diverse : les quartiers neufs sont souvent mieux entretenus (ordures balayées, fosses vidangées) que les quartiers anciens où l’on jette encore parfois les eaux ménagères par la fenêtre au cri de « Gare l’eau ». À la campagne, si l’air est plus pur, la maison est souvent sale, d’autant plus que les hommes partagent fréquemment le territoire des animaux. Là, ce sont le plus souvent les médecins, relayés par les municipalités, qui luttent pour l’installation de lavoirs, de fontaines communales, d’abattoirs municipaux, de services de voiries, de fosses d’aisances et de services d’enlèvement des ordures.

L’avènement de la microbiologie et la mise en évidence des micro-organismes pathogènes donnent un fondement à la nécessité de propreté et de désinfection des objets et des corps. La perception du nettoiement en est modifiée : l’eau devient également un moyen de lutte contre le danger potentiel du microbe et son utilisation se démultiplie, car il ne faut plus seulement laver, mais aseptiser. La stérilisation de l’eau (verdunisation par addition de petites quantités de chlore) est mise au point durant la Première Guerre mondiale. L’amélioration de sa qualité et sa surveillance constante permet un réel recul des maladies infectieuses.

La forte poussée urbanistique du xxe siècle augmente les problèmes sanitaires et nécessite un considérable développement des réseaux d’égouts. Mais jusqu’en 1954 par exemple, la commune de Saint-Rémy-de-Provence ne connaît pas de tout-à-l’égout, et une cuve traînée par un cheval est encore chargée de collecter tous les matins les seaux que les particuliers déposent devant leurs portes.

Puis, entre 1960 et 1980, 8 000 stations d’épuration sont construites en France. Les rues de Paris sont constamment nettoyées, les ordures enlevées quotidiennement et les récriminations ne concernent plus que l’envahissement des trottoirs par les matières fécales canines.

Uriner et déféquer

Qu’on ne s’y trompe pas, de tout temps — et jusqu’à une époque très récente —, c’est d’abord la nature qui accueille les excréments humains. En ville, c’est le seau, la rue, la rivière ou le fleuve qui les recueille.

Au Moyen Age, dans les châteaux médiévaux comme dans les monastères, on installe les premières necessaria, mais la disparition des forteresses dès le xive siècle supprime également les latrines des habitations. Les puissants adoptent alors la chaise percée, réservée à l’usage personnel de leur propriétaire et souvent richement parée. Au xvie siècle se popularise le pot de chambre en faïence (appelé encore bourdaloue ou thomas).

La chaise de nécessité devient de plus en plus à la mode, mais les gens du peuple, à l’image du roi Henri IV, utilisent toujours la rue comme latrines publique. De même, les personnes de qualités ne respectent pas plus les jardins que les appartements de la cour : uriner dans les cheminées ou dans les angles des appartements du Palais royal est pratique courante. On se soulage n’importe où, ce qui scandalise la princesse Palatine lors de son séjour à la cour : « Tout l’univers est rempli de chieurs et les rues de Fontainebleau de merde, car ils font des étrons gros comme vous, Madame », écrit-elle à l’Électrice de Hanovre au xviie siècle.

Au xviiie siècle, le porteur d’aisances ambulantes, affublé d’un grand manteau et d’un seau, vient donner un peu d’intimité aux passants souhaitant se soulager. C’est seulement en 1769 que des architectes importent d’Angleterre les premiers water-closets, mais ces derniers s’imposent lentement, et tout le long du xixe siècle, les chaises percées et les pots de chambre gardent la faveur des Français. À partir de 1880, les hygiénistes recommandent les W.-C. modernes qui apparaissent alors dans certains immeubles sociaux et dans les maisons bourgeoises. C’est également au xixe siècle que des normes concernant la construction des fosses d’aisances sont établies et leurs vidanges rendues obligatoires.

Néanmoins, longtemps encore en ville, les arbres, angles de boutiques et portes cochères servent d’urinoirs publics. Les premières vespasiennes installées en 1839 mettent du temps à se populariser et à être utilisées — et encore elles ne sont destinées qu’aux hommes, les femmes doivent attendre le début du xxe siècle, pour que leurs jupes et jupons cessent de protéger leur intimité s’épanchant dans les recoins des rues.

Avec les années 1930, le W.-C. se popularise et s’impose progressivement dans toutes les habitations. Il lui faut un peu plus de temps pour gagner la campagne mais, aujourd’hui, fosses septiques et tout-à-l’égout équipent plus de 95 % des habitations.

Politique publique

Enjeux

L’hygiène est un enjeu de santé publique, l’accès à un environnement (eau, air, sols, écosystème) propre et sain étant une condition première du développement durable. L’accès à l’eau potable en particulier été reconnu au « Sommet de la Terre » à Johannesburg comme un enjeu majeur pour le XXIe siècle. Ceci passe aussi par une réduction et bonne gestion des déchets et des substances potentiellement toxiques ou contaminantes.

Hygiène préventive

L’hygiène préventive se décline selon l’Organisation Mondiale de la Santé en trois classes de prévention :

  • · La prévention primaire : éducation à la santé, campagnes d’information, rôle des praticiens de santé naturopathes.
  • · La prévention secondaire : dépistage, vaccination, etc.
  • · La prévention tertiaire : accompagnement des pathologies lourdes pour en éviter les troubles secondaires ou associés.

Techniques

Nettoyage et détersion

Le nettoyage est le fait d’enlever les matières indésirables, dont notamment la matière organique (dont les graisses) ou les matières minérales (dont le calcaire ou le tartre), qui peuvent elles-mêmes contenir des micro-organismes ; le nettoyage ou désinfection permet également d’enlever certains micro-organismes. La détersion (détergence) est l’action de nettoyage qui consiste à enlever les salissures qui adhèrent à l’objet ou au tissu vivant.

Le nettoyage fait en général intervenir quatre paramètres : une action mécanique (pression de l’eau, frottement), chimique (dissolution de certaines matières dont les graisses), la température de l’eau servant à la dilution de la solution et enfin le temps d’action du détergent ‘cercle de Sinner ou CINER.

La méthode et le produit à employer dépendent de la nature de la souillure et de la fragilité du sujet du nettoyage ; pour l’hygiène corporelle, on emploie en général de l’eau tiède sans pression ou basse pression et du savon, mais pour des instruments, on peut utiliser des méthodes plus agressives.

Le nettoyage et la détersion n’ont qu’une action momentanée.

Désinfection et stérilisation

La désinfection consiste à tuer, éliminer ou inactiver les micro-organismes (bactéries, parasites..) ou les virus indésirables selon un objectif donné (par exemple diminuer la quantité de tel ou tel organisme en dessous d’un seuil fixé).

Quand la désinfection porte sur un tissu vivant, on parle d’antisepsie ; quand elle porte sur du matériel de soin, on parle de décontamination.

L’antisepsie et la désinfection ont une action limitée dans le temps.

La stérilisation consiste à éliminer du matériel la totalité des micro-organismes, et à conditionner ce matériel pour maintenir cet état de stérilité.

Comportement barrière

Les comportements-barrière sont l’ensemble des gestes et comportements individuels et collectifs susceptibles de ralentir la propagation d’une épidémie. La notion de comportements-barrière, dans le domaine de la lutte contre les épidémies, a été vulgarisée à l’occasion de la médiatisation du SRAS (syndrome respiratoire aigu sévère) et de la grippe aviaire. Mais, des mesures-barrières complexes et efficaces étaient pratiquées dès l’Antiquité et l’ont été à grande échelle contre les vagues successives de peste noire au milieu du XIVe siècle.

Si un bâtiment collectif dispose d’une centrale de climatisation (climatisation centralisée), l’AFSSET suggère de maintenir l’apport d’air extérieur et d’arrêter, si possible sans autre inconvénient, le recyclage. Si ce découplage du recyclage est impossible, maintenir le fonctionnement normal de la centrale de traitement de l’air.

Les responsables d’installations de climatisation devraient toujours tenir à jour le schéma des installations et un registre d’entretien, et maintenir l’aération régulière des locaux, et veiller à ce que les entrées d’air et bouches d’aération ne soient pas obstruées et « procéder à des essais de passage en tout air neuf, dans les bâtiments dotés d’une centrale de traitement d’air avec recyclage d’air ».

A titre d’exemple, certains experts, dont au sein de l’AFSSA en France, ont noté en 2005 un fait : les 5 premiers foyers de grippe aviaire en Russie de l’année étaient tous situés le long du transsibérien, et les 2 suivants le long d’une voie ferrée qui lui est perpendiculaire. Les excréments étaient rejetés depuis les trains sur les voies puis ingérés par les oiseaux.

Conclusion

Les fléaux d’antan ont été éradiqués ; ils resurgissent ça et là principalement dans les régions sous-développées. La place est libre pour les fléaux modernes : SIDA, cancer, ESB, bactéries résistantes. Ils sont à la une de tous les médias. Les traitements et vaccins se font attendre, et de nouvelles voies thérapeutiques apparaissent avec le 3ème millénaire. Nouvelles molécules de synthèse, d’origine végétale ou animale, thérapies géniques, technologies d’exploration fonctionnelle, les progrès de la science laissent espérer de grandes découvertes pour traiter les grandes pathologies de l’humanité dans un futur proche. La recherche et le temps permettent à l’homme de trouver les réponses à ses problèmes d’hygiène. L’hygiène ne fait pas tout, les microorganismes ont leurs lois, mais elle contribue à lutter contre l’expansion des maladies infectieuses et à préserver la santé dans sa globalité. Il est donc essentiel de l’intégrer à nos comportements de tous les jours.
Le rôle des milliers de collaborateurs des entreprises d’hygiène et propreté ainsi que leurs collègues spécialisés dans la collecte et le trie des déchets que nous rejetons tout les jours, reste l’une des armes les plus efficaces pour lutter contre l’expansion des maladies infectieuses.
Ce rôle, encore peu valorisé aux yeux du grand public, tend à établir ses lettres de noblesse avec une information sur les techniques, méthodes et produits utilisés, de plus en plus diffusée…

(Sources : Sites Internet « Institut Pasteur », encarta – encyclopédie Microsoft)

Explications des termes